Telle que Nozick l'exprime, la critique que les libertariens adressent à Rawls se cristallise dans deux objections fondamentales: sa théorie de la justice légitime une interférence continuelle de l'État avec les transactions volontaires des individus; et elle implique que l'on considère comme une dotation collective les talents des individus. Rawls récuse l'une et l'autre accusation, avec des arguments satisfaisants sur le premier point, mais pas sur le second. L'article montre comment une modification de la réponse de Rawls à la seconde objection conduit à vaincre les libertariens sur leur propre terrain. Mais si le «réal-liberta- risme» qui se dégage ainsi peut s'autoriser de la Théorie de la justice, il s'accorde moins bien avec le «deuxième Rawls» qui se dégage de ses écrits plus récents.